XI.- LAW OF THE SEA

(Poster 19)

Les ressources minérales des grands fonds marins sont, en majeure partie, situées au milieu des océans, au delà des limites des juridictions nationales (mer territoriale, plateau continental, zone économique exclusive).

Le 29 avril 1958, le Président de la première Conférence sur le droit de la mer (Convention de Genève) mentionne dans son discours d'ouverture la notion de "patrimoine commun de l'humanité", en parlant des ressources minérales des grands fonds.

En 1970, l'Assemblée Générale des Nations Unies adopte une déclaration de principe [Résolution 2749 (XXV) de l'Assemblée Générale] déclarant le fond des mers et des océans ainsi que leur sous-sol au delà des limites des juridictions nationales "patrimoine commun de l'humanité".

En 1973, au début des travaux de la IIIème Conférence internationale sur le droit de la mer, plus de la moitié du texte introductif est consacrée à la gestion des ressources minérales des fonds marins dans la zone internationale au-delà des limites des juridictions nationales. Mais il faudra neuf années de négociations avant que soient élaborées les dispositions autorisant l’exploration et à l’exploitation des nodules polymétalliques. Ce texte devait en principe être accepté par consensus des participants de la Conférence.

Cependant dès 1980, le gouvernement des Etats Unis, puis celui de l’Allemagne Fédérale et du Royaume Uni, adoptaient des lois régissant l’accès de leurs ressortissants à ces ressources, créant ainsi un véritable régime parallèle à celui en cours de discussion. La France ne tardait pas à les suivre en adoptant une législation similaire (Décret nº 81-555 du 1er juillet 1981, loi nº 81-1135 du 23 décembre 1981, décret d'application nº 82-111 du 29 janvier 1982).

Le 1er Juillet 1981, à l'exemple des industriels américains, allemand et anglais, le Centre national pour l’exploitation des océans (CNEXO, devenu l’Ifremer en 1984) déposait auprès du gouvernement français, pour le compte de l'Association française pour l’exploration et la recherche des nodules (AFERNOD), une demande de permis d'exploration couvrant un secteur de 455.000 kilomètres carrés.

Le 30 avril 1982, le texte final de la Convention sur le droit de la mer était adopté par 130 voix pour, 4 contre et 17 abstentions. Parmi les votes contre, on retrouve les Etats Unis, l’Allemagne Fédérale et le Royaume Uni.

Le 12 juillet 1982, la demande de permis français a été modifiée pour être ramenée à 300.000 kilomètres carrés, conformément aux prescriptions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

Le 10 décembre 1982, lors de la signature de la Convention sur le droit de la mer à la Jamaïque (signé par 119 délégations), la France émet des réserves sur l'applicabilité de la partie relative aux fonds marins. L'Allemagne Fédérale, les Etats Unis, le Royaume Uni refusent de signer. Un régime juridique intérimaire de protection des investissements préliminaires dans les fonds marins a été mis en place au plan international par la Conférence qui a élaboré la Convention sur le droit de la mer. Ce régime est établi par la Résolution II qui en définit les modalités d'application. Il est géré par la Commission préparatoire à l'Autorité internationale des fonds marins et du Tribunal international du droit de la mer, chargée de veiller à la mise en place du régime définitif. En 1983, la Commission préparatoire se réunit à Kingston (Jamaïque) pour commencer ses travaux.

Le 19 septembre 1983 de nouvelles modifications à la demande de permis français sont intervenues pour tenir compte des accords passés avec les consortiums américains en vue du règlement des conflits de chevauchement des demandes déposées auprès de cinq pays différents.

Le 12 janvier 1984 d'autres modifications à la demande de permis français sont intervenues pour tenir compte des nouveaux accords passés avec les consortiums américains et japonais, en vue du règlement des conflits de chevauchement. La demande française est réduite à 219.000 km2 dont 94.500 conservés de la demande de juillet 1982.

Le 3 août 1984 la France dépose, auprès du Secrétaire Général des Nations Unies, sa demande de permis d'exploration et sa demande d'enregistrement en qualité d'investisseur pionnier pour le compte d'AFERNOD. A la même date, la France signe un arrangement provisoire entre huit pays (Allemagne Fédérale, Belgique, Etats Unis, Grande Bretagne, Italie, Japon, Pays Bas), entérinant le résultat des négociations menées entre les consortiums.

Le 17 décembre 1984, un échange de coordonnées des demandes est organisé à Genève entre la France, l'Inde, le Japon et l'Union Soviétique: ces quatre états sont les investisseurs pionniers identifiés qui doivent fournir la preuve de l'absence de conflits entre leurs demandes au moment de leur enregistrement.

Le 5 septembre 1986 à New-York, la Commission préparatoire entérine un accord aux termes duquel le règlement des conflits entre les demandeurs peut être envisagé et l'enregistrement intervenir. La condition centrale de cet accord est l'engagement de chaque demandeur à contribuer à la constitution d'un site de 52.300 km2 dans le Pacifique qui reviendrait à l'Autorité. Chaque demandeur peut se voir attribuer un site de même superficie de son choix, et compléter ce site à 75.000 km2.

Des demandes révisées furent déposées par les quatre pays précités le 20 juillet 1987. Toutefois, l'Union Soviétique n'étant parvenue à résoudre ses conflits potentiels avec les consortiums nord-américains, seule la demande de l'Inde fut enregistrée le 17 août 1987.

 

Les demandes de la France, du Japon et de l'Union Soviétique ont été finalement enregistrées le 17 décembre 1987 à New-York. L'Ifremer, agissant pour le compte d'AFERNOD, s'est vu attribuer en tant qu'"investisseur pionnier" un secteur d'activités préliminaires de 75.000 km2 en trois morceaux, dont 43.960 km2 proviennent de la demande déposée par AFERNOD en juillet 1981.

L'Union Soviétique et le Japon ont reçu également chacun 75.000 km2. La superficie des secteurs réservés "aux activités menées par l'Autorité par l'intermédiaire de l'Entreprise ou en association avec des Etats en développement" s'élève à 587.728 km2 dont 150.000 dans l'océan Indien. Les 92.672 km2 restitués par l'Union Soviétique au moment de l'enregistrement sont réservés "pour qu'ils deviennent partie des secteurs susceptibles de demande par les demandeurs potentiels". Ils sont incorporés dans les 794.000 km2 qui restent aux quatre consortiums enregistrés auprès des Etats Unis, du Royaume Uni et de l'Allemagne Fédérale.

Le 5 mars 1992, la COMRA (China Ocean Mineral Resources Research Development Association) de la République Populaire de Chine a été enregistrée en tant qu'investisseur pionnier et s'est vu attribué un secteur de 150.000 km2 dans la partie occidentale de la zone de Clarion-Clipperton dans le Pacifique.

Le 21 août 1992, Interocean Metal, groupement d’organismes appartenant à la Bulgarie, Cuba, la Pologne, la République Tchèque, la Slovaquie et l'Union Soviétique a reçu un secteur de 150.000 km2 dans la partie orientale de la zone de Clarion-Clipperton, avec le statut d'investisseur pionnier.

Au total 2.316.418 km2 étaient ainsi couverts par des titres miniers, dont 887.768 réservés à l'Autorité internationale, 675.000 alloués par la Commission préparatoire et 615.350 attribués par des gouvernements n'ayant pas signé la Convention sur le droit de la mer.

L'attribution des secteurs d'activités préliminaires aux investisseurs pionniers était assujettie d'obligations sur l'exécution desquelles est intervenu le 30 août 1990 un accord au sein de la Commission préparatoire. Aux termes de cet accord, les investisseurs pionniers doivent assurer la formation d'un premier groupe d'une douzaine de stagiaires en provenance de pays en développement.

Par ailleurs, les trois pionniers dont les secteurs se situent dans le Pacifique, devaient réaliser en commun l'exploration des 71.570 km2 réservés à l'Autorité dans la zone centrale. Le programme prévoyait, dans une première phase, des levés bathymétriques par sondeur multifaisceaux, des prélèvements et des photographies ponctuelles du fond, et un levé de l'abondance des nodules par méthode multi-acoustique. La première étape de ce programme a été réalisée en 1991 par la remise à la Commission préparatoire d'un rapport de synthèse des données antérieures existantes, réalisé en commun par les trois pionniers.

Le 16 novembre 1993, un soixantième état ratifiait la Convention qui, comme prévu, est entrée en vigueur le 15 novembre 1994 soit un an après.

Le 14 janvier 1994, le KORDI (Korean Ocean Research and Development Institute) de la République de Corée déposait auprès du Secrétaire général des Nations Unies sa demande d'enregistrement en tant qu'investisseur pionnier et s'est vu attribué un secteur de 150.000 km2 dans la partie septentrionale de la zone de Clarion-Clipperton dans le Pacifique.

 

Dès 1992, des négociations avaient été entreprises à l’initiative du Secrétaire général des Nations Unies entre signataires et non-signataires de la Convention. Elles aboutirent, le 28 juillet 1994, à l’adoption de la résolution 48/263 des Nations Unies, connue sous le nom d'Accord relatif à la mise en œuvre de la partie XI de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Ce texte, qui fait désormais corps avec la Convention, apporte un certain nombre de modifications aux mesures antérieurement prises. Ainsi l’obligation de transfert de la technologie, les dispositions relatives à la limitation de la production, les clauses financières relatives à la création de l’Entreprise internationale et aux contrats d’exploration et d’exploitation des ressources ont été rapportées. Les futures dispositions devront être prises en concordance avec les conditions prescrites par l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce. Par ailleurs, l’Entreprise ne pourra être créée que sous la forme d’une coentreprise. Des dispositions particulières ont été également prévues pour l’approbation des plans de travail des investisseurs pionniers et des " demandeurs potentiels ".

L'Autorité internationale des fonds marins s'est installée, comme prévu, à Kingston (Jamaïque) fin 1994. Elle comporte les organes suivants :

  1. L'Assemblée générale, à laquelle participent non seulement les pays qui avait ratifié ou adhéré à la Convention et à l'Accord, mais aussi les pays membres à titre provisoire qui avaient consenti à être lié à l'Accord, en attendant leur adhésion définitive à la Convention. Cette dernière disposition est venue à échéance le 16 novembre 1998. Désormais seuls les états qui ont ratifié ou adhéré à la Convention et à l'accord, sont membres. Toutefois, les autres pays conservent la possibilité de suivre les travaux de l'Autorité à titre d'observateurs. La France a ratifié la Convention le 11 avril 1996
  2. Un Conseil de 36 membres élus par l'Assemblée, comprenant 5 groupes :
    1. quatre pays parmi les plus importants consommateurs des métaux contenus dans les nodules,
    2. quatre pays parmi ceux qui ont le plus investi dans la Zone,
    3. quatre pays parmi les plus importants exportateurs des métaux contenus dans les nodules,
    4. six pays en développement parmi les plus défavorisés ou les plus importants importateurs des métaux contenus dans les nodules,
    5. dix-huit pays représentant les différents groupes géographiques.
  3. Le Conseil dispose de deux commission d'experts : la Commission juridique et technique et la Commission des finances. Les membres de ces commissions sont élus pour 5 ans à partir de listes de candidats présentés par les Etats membres. Le renouvellement de leurs membres est prévu pour 2002.

De 1995 à 2000, l'Autorité a tenu 10 réunions, mettant en place ses différents organes et approuvant les plans de travail déposés par les investisseurs pionniers. Elle a adopté, en juillet 2000, le règlement relatif à la prospection et à l'exploration des nodules polymétalliques dans la Zone, sorte de code minier limité à l'exploration. Elle fonctionne depuis 1998 sur un budget autonome, actuellement fixé aux alentours de 5 millions de dollars américains. Ce budget est alimenté par les contributions des Etats membres suivant un barème voisin de celui des Nations Unies. La France y participe pour environ 6,5 %.

Les opérateurs, dont le plan de travail a été approuvé en août 1997, ont passé avec l'Autorité un contrat d'exploration en 2001, sur la base des dispositions adoptées dans le Code minier.

Les plans de travail présentés n'envisagent que des travaux d'exploration générale pour les cinq premières années. Ils ne prévoient de passer à l'exploration détaillée, aux études de faisabilité et aux tests miniers, que lorsque les conditions économiques permettront d'envisager des perspectives d'exploitation commerciale.

La France a signé le contrat avec l'ISA pour 3 périodes de 5 ans le 20 juin 2001. Il prévoit principalement une étude de la biodiversité sur toute la zone de Clarion et Clipperton.

C'est à la suite de la signature du contrat que l'Ifremer a mené sa campagne "NODINAUT" avec le Nautile.

L’Autorité internationale des fonds marins et le Bundesanstalt für Geowissenschaften und Rohstoffe de la République fédérale d’Allemagne ont signer à Berlin le 19 juillet 2006 un accord portant sur un plan de travail relatif à l’exploration. L'Allemagne devient donc un pays "pionnier" avec un permis minier dans le Pacifique équatorial nord.