Milieux extrêmes océaniques
Plusieurs zones des grands fonds océaniques peuvent être considérées comme des milieux extrêmes terrestres. Milieux extrêmes du point de vue des conditions qui y règnent, milieux extrêmes du point de vue de l'adaptation de la vie. Les zones de sources chaudes sur les dorsales médio-océaniques et de sources froides sur les marges continentales sont des lieux spécifiques dans lesquels plusieurs paramètres se combinent pour former des environnements originaux dont la compréhension implique des études géologiques, chimiques, biologiques et microbiologiques.
Parmi les critères qui caractérisent les milieux extrêmes profonds, on peut citer : l'influence de la pression et de la température, l'absence de lumière, la variabilité de composition des fluides émis du plancher océanique, l'influence de la tectonique et du volcanisme profond.
La pression très forte, variant de 100 à 500 bars, joue un rôle important sur les propriétés physiques et chimiques de l'eau de mer. Elle contrôle les réactions chimiques au sein des roches et donne naissance à des fluides hydrothermaux. Des sorties de fluides sont connues depuis des zones situées à quelques centaines de mètres jusqu'à plus de 4000 m de profondeur.
Le deuxième paramètre est la température des fluides qui peut dépasser 400°C sur les volcans sous-marins. La température des fluides influence les processus géochimiques et biologiques dans les zones de sorties des fluides.
Dans ces environnements profonds, du fait de l'absence de lumière, la vie ne se développe pas par photosynthèse, mais par chimiosynthèse, les éléments nécessaires au développement animal biologique et microbiologique sont des gaz tels que H2, H2S, CH4 et/ou des éléments minéraux présents dans les fluides.
L'action combinée de la pression et de la température, dans des roches de nature variée, donne naissance à des fluides de composition chimique très variable (acidité, teneur en métaux, salinité, concentration en oxygène…). Ces fluides agissent sur l'environnement géologique, contrôlent la nature des dépôts sulfurés et l'environnement biologique et microbiologique.
Ces milieux extrêmes sont des zones sensibles pouvant subir des changements profonds et rapides du fait de l'activité tectonique et/ou magmatique. Les événements et épisodes volcaniques brutaux entraînent des modifications de composition des fluides, des bouleversements et transformations du monde biologique et microbiologique. Les périodes de stabilité sont à l'inverse propices au développement biologique et microbiologique.
Les questions scientifiques qui se posent sont nombreuses :
- Comment ces fluides sont générés dans les profondeurs de la terre ?
- Quelle est l'importance de la tectonique pour le transfert des fluides ?
- Quelle est l'influence de la nature des roches lessivées sur la composition des fluides ?
- Quelle est l'importance des échanges et des transferts chimiques générés par ces fluides ?
- Comment les bactéries tirent-elles leur énergie des composés chimiques contenus dans les fluides ?
- Quels mécanismes d'adaptation développent les animaux pour s'installer dans ces milieux acides, riches en métaux, surchauffés et appauvris en oxygène ?
- Jusqu'à quelle profondeur dans les roches peut-on rencontrer une vie bactérienne ?
- Comment ces fluides transportent-ils les métaux pour les concentrer sur le plancher océanique ?
- Les milieux extrêmes mantelliques, pauvres en oxygène, reflètent-ils les conditions qui régnaient sur terre au moment de l'apparition de la vie il y a près de 4 milliards d'années ?
- Que peuvent apporter ces milieux extrêmes pour la compréhension de la formation des ressources énergétiques, des ressources minérales et de la biodiversité des grands fonds océaniques ?